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- Bilan de la réforme des CSE : alerte sur l’épuisement et le découragement des élus
La disparition des comités d’entreprise et des CHSCT n’a pas permis d’améliorer la démocratie en entreprise. Le comité d'évaluation des ordonnances travail dresse un bilan mitigé de la réforme des institutions du personnel et pointe de nombreuses difficultés rencontrées par les élus. La CFDT fait également le bilan des effets néfastes de la fusion des instances représentatives au sein du CSE.
Les ordonnances de septembre 2017 avaient pour ambition de renouveler le dialogue social dans les entreprises avec la création du comité social et économique (CSE). Le rapport du comité d'évaluation des ordonnances travail, dresse un bilan mitigé de la réforme des institutions du personnel et souligne le « découragement de nombre d’élus » depuis la réforme.
Ce rapport remis mi-décembre brosse un tableau en demi-teinte de la réforme, listant un certain nombre de conséquences "contre-productives": "allongement des réunions et des ordres du jour pour traiter l'ensemble des sujets, moindre engagement des élus, manque d'articulation entre le CSE et les commissions, difficulté de traitement des questions de santé et sécurité au travail".
Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger a abondé en ce sens vendredi 7 janvier, lors d'une conférence de presse au cours de laquelle il a également vivement critiqué les conséquences de la réforme des CSE.
Conséquences "contre-productives" de la réforme des CSE
Le comité d'évaluation des ordonnances travail a publié, en décembre 2021, un rapport sur les ordonnances "Macron" de 2017, piloté par France Stratégie.
Le rapport examine l'effet des ordonnances sur la transformation du dialogue social. Les ordonnances de 2017 ont notamment fusionné les instances existant jusqu'alors - délégués du personnel, comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), comité d'entreprise (CE) - en une seule, le CSE, au sein duquel est instaurée une commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) pour les entreprises de plus de 300 salariés. La substitution des comités sociaux et économiques aux anciens CE, CHSCT et délégués du personnel visait à simplifier le dialogue social dans les entreprises.
Difficultés de mise en place
La date limite d'instauration des comités sociaux et économiques était le 31 décembre 2019. Du fait de la crise sanitaire liée au Covid-19, cette échéance a été décalée.
En 2019, un tiers des entreprises de 10 salariés et plus étaient couvertes par un nouveau CSE. Au 31 décembre 2020, on dénombre quelque 90 000 CSE pour 49 000 situations de carence (absence de candidats aux élections professionnelles pour mettre en place des instances).
Quant aux commissions santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT), issues des CSE, elles sont facultatives dans les entreprises de 50 à 300 salariés (les CHSCT étaient obligatoires dès 50 salariés). La couverture globale des salariés est en recul (elle est de 46% dans les entreprises de 10 salariés ou plus en 2019, contre 75% en 2017).
Epuisement et découragement de nombre d'élus
Le rapport pointe les nombreuses difficultés que produit la réforme des institutions représentatives du personnel.
Selon le rapport, la fusion des instances dans le CSE (comités d'entreprise, délégués du personnel, CHSCT) et l'élargissement des sujets à aborder constituent ainsi un élément de fragilisation de l'engagement des élus :
- surcharge de travail de représentation ;
- difficultés de conciliation avec l'activité professionnelle ;
- manque d'expertise sur l'ensemble des sujets.
Le rapport met en avant l'épuisement et le découragement de nombre d'élus. Certains se mettent en retrait de leur mandat, d'autres démissionnent.
Dans cet « ordonnancement » entièrement remanié, la mission des représentants des travailleurs se révèle plus ardue qu’avant. Les réunions sont, certes, « moins fréquentes » mais « elles sont aussi plus longues et avec des ordres du jour plus denses ». Le fait que les membres suppléants du CSE ne puissent pas assister aux échanges au sein de cette instance pose également problème : ils sont moins bien associés « au suivi des sujets », ce qui complique « leur préparation éventuelle à des mandats futurs ». Pas idéal pour assurer la relève.
De leur côté, les titulaires trouvent, bien souvent, que leur travail est « plus exigeant, plus lourd et plus complexe » qu’avant, tandis que les moyens mis à leur disposition ne sont pas toujours à la hauteur. La « technicisation » de leur rôle peut avoir une incidence préjudiciable sur « l’attractivité » de telles responsabilités. Le rapport s’appuie sur plusieurs « monographies » qui décrivent « l’épuisement » et « le découragement de nombre d’élus, certains se mettant en retrait de leur fonction et d’autres démissionnant ».
Problème d'attractivité des mandats
Les problèmes de fonctionnement du dialogue social existaient avant la réforme, note le rapport, mais celle-ci a créé de nouvelles tensions liées à l'amplitude et à la technicité des missions alors même que le nombre d'élus comme de réunions ont été réduits et que les élus de proximité qu'étaient les délégués du personnel ont disparu sans être vraiment remplacés.
Lors de la présentation des travaux de la mission à la presse, Marcel Grignard n'a pas caché son inquiétude : « Commence à pointer un problème d'attractivité des mandats avec un risque de décrochage à tel point qu'on peut se demander si lors du renouvellement des instances, il y aura assez de candidats dans les entreprises. »
Le renouvellement des CSE, dans les années à venir, sera « un enjeu important », souligne le comité d’évaluation. Une formule pudique pour suggérer que la crise des vocations est un risque bien réel.
Défiance des élus vis-à-vis des nouvelles instances
La grande enquête nationale des CSE, que nous avons mené en 2019 auprès de 1000 élus de CSE mettait déjà clairement en évidence une forte défiance de la part des élus vis-à-vis de la réforme des CSE.
45% d’entre eux se déclaraient inquiets vis-à-vis des nouvelles instances, notamment parce qu’elles diminuent le temps et les moyens alloués aux activités de représentation ainsi que leur poids face à la direction. Près de 6 élus sur 10 estimaient d’ailleurs que la direction est la grande gagnante de cette réforme.
La CFDT dresse également un bilan très critique des ordonnances Macron
Lors d'une conférence de presse vendredi 7 janvier, Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT a également vivement critiqué la réforme des CSE. La CFDT critique la centralisation excessive des instances de représentation du personnel qui empêche les élus, faute de moyens, de mener leurs missions.
« La réforme de 2017 a fait une confiance aveugle aux employeurs pour concrétiser les objectifs affichés par les ordonnances tout en leur donnant les moyens d'y échapper. Cet « en même temps » a fait une victime : la qualité du dialogue social », a-t-il déclaré.
La CFDT a enfoncé le clou avec un seul chiffre : seul un CSE sur cinq a été mis en place par voie d'accord.
Plusieurs représentants syndicaux CFDT ont témoigné des conséquences de la réforme dans leur entreprise: ainsi, chez IBM, entre 2017 et 2021 le nombre d'instances est passé de 19 à 3, et le nombre d'heures de délégation annuelles pour les élus de plus de 120.000 à 35.000, a expliqué Hélène Bouix. Cette «réduction des moyens» a eu pour effet une moindre proximité avec les salariés et une moindre «efficacité sur les problématiques de santé et de condition de travail», a-t-elle résumé.
Le constat de la centrale syndicale ? Pêle-mêle, nombre d'heures de délégations trop faible, réunions des CSE fleuves et trop souvent chambres d'enregistrement des décisions de l'employeur, élus insuffisamment formés et donc épuisés pour manier à la fois les questions économiques, sociales, de santé au travail, ou d'environnement, sans oublier les suppléants largués sur les dossiers, faute de pouvoir assister aux réunions ou les délégués de proximité quasi disparus du paysage…
La CFDT propose plusieurs pistes d'améliorations, parmi lesquelles une hausse du nombre d'heures de délégation, la possibilité pour les suppléants d'assister aux réunions du CSE, la mise en place obligatoire de représentants de proximité, la possibilité pour les syndicats de communiquer via les mails professionnels des salariés.
Réunion le 10 janvier
Du côté du gouvernement, on relativise, annonçant avoir saisi les partenaires sociaux de propositions sur des sujets aussi divers que la formation des élus, la mobilisation des services déconcentrés et le recensement des démarches innovantes pour venir en appui dans les entreprises, ou encore le développement de formations diplômantes pour les élus.
Pour le ministère du Travail, pas question de toucher à la réforme, fusse à la marge. Le patronat et les syndicats ont été invités à une réunion lundi 10 janvier 2022.
Dans un document publié à l'issue des rencontres du 10 janvier, le gouvernement, qui n’entend pas revoir sa réforme, reconnaît que «des marges de progrès existent». Il propose des mesures d’accompagnement pour faciliter sa mise en œuvre, comme une formation des élus du personnel, une communication sur les bonnes pratiques de certaines entreprises et une sensibilisation des petites entreprises à l’intérêt de mettre en place une instance représentative.
Pour aller plus loin
- Téléchargez le rapport sur les ordonnances "Macron" de 2017 du comité d'évaluation des ordonnances travail
- Consultez les résultats de la grande enquête nationale des CSE - Officiel CSE 2019
Publié le 7 janvier 2022
Sources : Officiel CSE, Le Monde, Les Echos
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