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- Cession d’Editis : le cabinet Secafi Alpha, mandaté par le CSE, conteste le mode de cession choisi par Vivendi
Le projet de cession d'Editis par Vivendi se précise. La famille Bolloré, principal actionnaire du Groupe Editis, privilégie une cotation en Bourse. Les salariés d’Editis sont quant à eux très hostiles à une mise en Bourse de leur entreprise. Le cabinet Secafi Alpha, mandaté par le comité social et économique (CSE) d’Editis, affirme que le choix retenu d’une mise en Bourse avec un actionnaire de référence « ne présente aucun avantage majeur pour l’entreprise ou ses salariés ».
Le groupe Editis est le numéro deux de l’édition française et compte plus de 50 marques d'édition telles que Robert Laffont, Plon, Bordas, 10/18, La Découverte… dans trois pôles principaux : littérature, éducation et ouvrages de référence.
Vivendi souhaite vendre Editis pour que Bruxelles ne retoque pas son rachat d'Hachette (via l'OPA sur le groupe Lagardère de mi-2022), le leader du marché tricolore, pour des raisons anticoncurrentielles. Renonçant à son idée de mégafusion entre Hachette et Editis, Vivendi avait annoncé, fin juillet 2022, sa décision de se séparer d’Editis. Il espérait ainsi obtenir la bénédiction des autorités anticoncurrentielles de Bruxelles pour avaliser son offre publique d’achat sur Lagardère, la maison mère d’Hachette, numéro un de l’édition dans l’Hexagone et numéro trois mondial.
Depuis juin 2022, Vivendi détient 57,35 % du capital de Lagardère, mais ne peut exercer que 22,46 % de ses droits de vote tant que la Commission européenne n’a pas donné son feu vert à cette prise de contrôle. L’exécutif communautaire, qui mène une enquête approfondie sur ce rachat, s’est donné jusqu’au 23 mai pour trancher.
Pour quelle raison Vivendi privilégie-t-il la scission au lieu de la vente totale d'Editis ?
Fin janvier, des émissaires du groupe Vivendi contrôlé par la famille Bolloré ont précisé leurs plans et montages juridico-financiers à venir pour Editis lors d'un comité de groupe. Malgré les réserves des représentants du personnel, ils ont confirmé, de fait, que l'option de la cotation-distribution en Bourse, présentée l'été dernier, demeurait le scénario privilégié.
D'une part, Vivendi a soutenu, lors du comité de groupe, qu'aucun acquéreur potentiel ne s'était positionné sur un achat à 100 % d'Editis. D'autre part, cela permet d'élargir le socle des repreneurs potentiels, le prix à payer pour prendre le contrôle de l'éditeur étant significativement moins élevé qu'en cas d'une vente à 100 %.
Actuellement, les discussions sur la valorisation d'Editis tournent autour de 500 millions d'euros (sans compter 200 millions de dettes) ; le repreneur n'aurait qu'à débourser autour de 150 millions dans ce scénario.
Plusieurs repreneurs ont déposé des offres : le canadien Québecor, le groupe de presse Reworld (« Top Santé », « Science & Vie », etc.) et le trio composé de Stéphane Courbit (FL Entertainment, au risque d'un conflit d'intérêts puisque Vivendi en est actionnaire à hauteur de quasiment 20 %), Daniel Kretinsky (derrière CMI qui détient plusieurs titres de presse comme « Elle » ou « Marianne »), et Pierre-Edouard Stérin (fondateur de Smartbox) qui ont déposé à la dernière minute, mercredi 15 février, une offre conjointe.
Les salariés hostiles à une mise en Bourse de leur entreprise
Ce projet suscite des inquiétudes auprès des salariés d’Editis. Dans un document confidentiel réalisé avec le cabinet Secafi Alpha présenté en début d’année à leur direction, les salariés veulent « sécuriser l’avenir d’Editis avec un repreneur unique, qui reprend l’intégralité du périmètre, sans introduction en Bourse, ni leveraged buy-out [LBO, rachat en ayant recours à beaucoup d’endettement], ni fonds d’investissement ». Ils aspirent à être « à l’abri de toute stratégie court-termiste et de toute spéculation boursière et financière ».
Echaudés, puisqu’ils ont déjà changé de propriétaire cinq fois en vingt ans, les salariés espèrent que le repreneur aura une réelle solidité financière et une « capacité d’investissement démontrée, en phase avec les enjeux de développement d’Editis, avec un engagement sur le long terme (au-delà de dix ans) ».
Secafi Alpha, mandaté par le CSE d’Editis, alerte sur les risques
Le dernier rapport sur le schéma de cession d’Editis prévu par sa maison mère Vivendi a été remis jeudi 2 mars par le cabinet Secafi Alpha. Le cabinet est mandaté pour « information consultation » par le comité social et économique (CSE) d’Editis. Ce rapport a le mérite de dire les choses sans détour.
Tout d’abord, « la cession d’Editis via la mise en Bourse de la majorité de son capital ne correspond pas au schéma souhaité par les salariés du groupe et leurs représentants », affirment les auteurs du rapport, Luc Berard de Malavas et Adrien Signoretto. Le rapport précise également que « L’analyse des risques et opportunités liés à ce projet montre que l’opération ne présente aucun avantage majeur pour l’entreprise ou ses salariés ». Les futurs repreneurs d’Editis sont ainsi prévenus.
Les conclusions du rapport devraient aussi interpeller le vendeur. Vivendi veut céder à un actionnaire de référence les 29,6 % que Vincent Bolloré détient dans Editis, tout en cotant cette dernière sur le marché Euronext Growth. Simultanément, il distribuerait des actions Editis à ses propres actionnaires, au prorata de celles qu’ils détiennent déjà. Ce choix d’une « distribution cotation » déjà utilisé pour Universal Music Group éviterait une « sortie de cash » des actionnaires de Vivendi, qui recevraient un dividende sous forme d’actions de la filiale cotée.
Les risques liés à la cotation en Bourse
Le projet pourrait avoir un impact négatif sur la diversité des livres disponibles, car Editis pourrait rechercher des gains à court terme et se concentrer uniquement sur les livres les plus rentables.
« Le livre est une industrie de temps long », de douze à vingt-quatre mois. Chaque livre est un « prototype », ni modélisable ni reproductible, ce qui n’assure pas de récurrence des revenus. De plus, l’évolution du marché du livre – protégé par un maillage du réseau de librairies et le prix unique du livre dans l’Hexagone – n’a pas connu d’évolution significative à la hausse ou à la baisse depuis vingt ans. Si bien que « les attentes des marchés financiers semblent peu compatibles avec un secteur où l’avenir se construit de manière solide, mais lente », selon les auteurs.
Secafi Alpha redoute également « une instabilité de la gouvernance », voire « des restructurations ou la cession de branches d’activité » en cas de baisse des cours ou de ventes massives des titres sur le marché au-delà des trois ans prévus de conservation des titres.
Secafi Alpha prône donc pour un repreneur qui s’engage sur cinq ans et défende « un projet industriel solide pour Editis », qui associerait « les salariés à [sa] réussite et au partage de la création de valeur ».
Publié le 7 mars 2023
Sources : Officiel CSE, Le Monde, Les Echos
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