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- Multiplication des plans sociaux et montée des tensions sociales : la France sous pression !
La fin de l'année 2024 est marquée par une multiplication des plans sociaux en France, touchant de nombreux secteurs économiques. Automobile, distribution, chimie… Les licenciements et les annonces de fermeture d’entreprises se multiplient dans de nombreux secteurs et pourraient se poursuivre ces prochains mois. L’inquiétude monte face aux plans sociaux. L’horizon s’assombrit et les difficultés s’accumulent.
L’annonce en cascade, depuis le 5 novembre, de la fermeture de deux usines Michelin à Cholet (Maine-et-Loire) et à Vannes – soit 1 254 salariés – d’un plan social chez Auchan, qui s’apprête à supprimer 2 389 emplois, puis de la mise en redressement judiciaire du chimiste Vencorex, menaçant quelque 500 emplois, a soulevé une vague d’inquiétude dans le pays.
L'Insee a enregistré 241 000 licenciements en France métropolitaine au 2e trimestre 2024 et 25.000 destructions nettes d'emploi au 3e trimestre 2024 et la tendance devrait se confirmer en 2025.
Cette vague de restructurations et de licenciements, conséquence directe d'une conjoncture économique difficile, alimente un climat social tendu et soulève des interrogations sur les choix stratégiques des entreprises et le rôle de l’État face à cette crise.
Hausse des plans sociaux : symptôme d’une crise profonde
Le secteur de l’automobile est emblématique. Concentré de mutations structurelles et de fragilités plus conjoncturelles, il est frappé à la fois par la baisse des ventes de voitures particulières, toujours 15 % en dessous de leur niveau d’avant-Covid-19, la transformation technologique avec le passage à l’électrique et des prix de l’énergie plus élevés que ceux payés par les concurrents chinois.
D’un point de vue sectoriel, la filière automobile, à elle seule, risque de payer un lourd tribut à la transition vers l’électrique, sur laquelle elle est largement distancée par la Chine. En France, de très nombreuses entreprises du secteur sont en difficulté : Dumarey, Inteva Products, JTEKT, GMD, Fonderie de Bretagne…
Mais si elle est la plus touchée et la plus visible, l’automobile n’est pas la seule filière qui est à la peine. Grande distribution, immobilier, BTP, mais aussi chimie, papeterie, abattoirs… D’autres secteurs et industries souffrent :
• La grande distribution : affectée par l’essor du commerce en ligne et la diminution de la consommation des ménages, plusieurs grandes enseignes réduisent leurs effectifs et ferment des magasins. Les plans sociaux entraînent la suppression de postes dans les magasins, les entrepôts et les services administratifs. Les postes les plus touchés sont souvent ceux des employés en caisse ou en rayon.
• Chimie et papeterie : ces secteurs subissent la pression de pays à coûts de production plus faibles. La réduction des commandes de certains produits industriels, couplée à une baisse d’activité dans l’automobile, affecte le secteur. Les restructurations dans la chimie et la papeterie entraînent la fermeture d’usines, souvent situées dans des zones déjà fragiles économiquement.
• BTP : En 2024, le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) en France est particulièrement touché par les plans sociaux. Les taux d'intérêt élevés, la hausse des coûts des matériaux, la réduction des aides publiques et les difficultés de financement ont conduit à l'annulation ou à la mise en pause de nombreux projets.
• La tech : les entreprises, après un essor fulgurant durant la pandémie, rationalisent leurs effectifs face au ralentissement de la croissance économique mondiale.
Les défaillances d’entreprises retrouvent leur plus haut niveau
En 2024, les défaillances d’entreprises ont atteint leur plus haut niveau depuis 15 ans. Selon l’observatoire BPCE, plus de 13 000 entreprises ont fait faillite au troisième trimestre, portant le total à 64 427 faillites sur les 12 derniers mois. Cela représente une augmentation de 24 % par rapport à 2019, avant la crise du Covid.
Le terme « défaillance » désigne des situations financières compliquées pour une entreprise, avec des issues variables : cela peut aller d’une procédure de sauvegarde pour éviter la faillite, à un redressement judiciaire (lorsque l’entreprise ne peut plus payer ses dettes), ou à une liquidation judiciaire, qui marque la fin de son activité.
Certains secteurs sont particulièrement touchés. La construction, fragilisée par la hausse des coûts et des taux d’intérêt, a vu ses effectifs baisser de 2 % en un an. Dans l’industrie, la reprise amorcée après la pandémie s’essouffle : les effectifs n’ont augmenté que de 0,6 % au troisième trimestre.
Un climat social sous tension
Cette vague de licenciements et de fermeture d’usines a ravivé des tensions sociales dans tout le pays. Plusieurs mouvements de grève ont éclaté dans des secteurs stratégiques, notamment dans les transports, l'énergie et l'éducation. Les revendications des salariés vont au-delà de la sauvegarde de leurs emplois :
• Lutte contre la précarité : de nombreux travailleurs dénoncent une augmentation des contrats précaires et une érosion du pouvoir d’achat. Les prix élevés de l’énergie et des produits alimentaires continuent de peser sur les ménages.
• Demande de justice sociale : Les critiques se concentrent sur le manque de cadre légal pour encadrer les délocalisations ou limiter l’impact des restructurations. Les primes aux dirigeants et les dividendes versés aux actionnaires sont pointés du doigt comme incompatibles avec les réductions d’effectifs.
• Demandes d’accompagnement renforcé : la reconversion professionnelle et l’accès à des formations adaptées figurent parmi les attentes des employés menacés. Salariés et syndicats réclament davantage de dispositifs pour faciliter les transitions vers des secteurs porteurs.
Les réponses politiques et institutionnelles
Face à cette crise, le gouvernement se trouve sous pression pour répondre aux attentes des salariés tout en préservant la compétitivité des entreprises. Parmi les mesures annoncées :
• Création d’un fonds de transition pour aider les secteurs en difficulté à s’adapter aux nouvelles exigences économiques, notamment écologiques.
• Renforcement des contrôles sur l’utilisation abusive des plans sociaux et sur les justifications financières des entreprises.
• Développement des formations professionnelles afin d’accompagner les salariés vers des secteurs porteurs comme les énergies renouvelables ou la santé.
Cependant, ces mesures peinent à convaincre une partie des syndicats, qui dénoncent un manque de volonté politique pour encadrer les délocalisations et réguler les comportements des grandes multinationales.
Les élus des CSE en première ligne
Dans un contexte marqué par une multiplication des plans sociaux et un regain de tensions sociales en France, les élus des comités sociaux et économiques (CSE) jouent un rôle central dans la défense des droits des salariés.
Ces instances, créées pour garantir le dialogue social au sein des entreprises, se trouvent aujourd'hui en première ligne pour accompagner, protéger et représenter les travailleurs menacés par les restructurations.
Lorsqu’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) est annoncé, les élus du CSE ont des droits et des responsabilités spécifiques :
• Consultation et analyse des justifications économiques : Les élus du CSE doivent vérifier la légitimité économique du PSE en étudiant les documents transmis par l’entreprise. Le comité peut demander des explications détaillées et contester les arguments avancés si nécessaire.
• Propositions alternatives : Les élus du CSE peuvent proposer des solutions alternatives au licenciement, comme des mesures de chômage partiel, des départs volontaires, ou des reconversions internes.
• Négociation des mesures d’accompagnement : Les élus participent à la négociation des indemnités de départ et des dispositifs de reclassement. Leur rôle est de veiller à ce que ces mesures soient équitables et adaptées aux besoins des salariés.
• Recours juridiques : En cas de litige ou de non-respect des obligations légales par l’employeur, le CSE peut saisir les tribunaux pour défendre les intérêts des salariés.
Avec la multiplication des plans sociaux, l’accompagnement des salariés dans leur transition professionnelle devient une priorité. Les élus CSE peuvent :
• Faciliter l’accès à des formations pour aider les salariés à se requalifier dans des secteurs porteurs.
• Promouvoir les dispositifs d’aides locales ou nationales, comme les fonds de transition écologique ou numérique.
• Suivre les dispositifs de reclassement mis en place par l’entreprise pour s’assurer qu’ils sont effectifs et adaptés.
Dans cette période de tensions économiques et sociales, les élus des CSE sont des acteurs essentiels pour défendre les droits des salariés, maintenir le dialogue social et construire des solutions pour l’avenir. Leur action, à la fois pragmatique et militante, peut contribuer à atténuer les impacts des crises sur les salariés.
Quel avenir pour le dialogue social ?
La fin de l’année 2024 s'annonce comme une période charnière pour le dialogue social en France. Les tensions entre salariés, dirigeants et pouvoirs publics reflètent une fracture profonde dans le monde du travail.
Alors que certains appellent à une refonte des politiques économiques et sociales, d’autres soulignent l’urgence de restaurer la confiance par des mesures plus inclusives et durables. Dans ce contexte, l’année 2025 pourrait être marquée par des évolutions majeures, tant au niveau législatif que dans les rapports de force entre acteurs sociaux.
Le défi reste de taille : concilier les impératifs économiques et la justice sociale, dans un climat où chaque décision semble exacerber les tensions.
Publié le 25 novembre 2024
Sources : BPCE L’Observatoire : « Etude - Défaillances d’entreprises en France »,
Insee : « Défaillances d’entreprises Données mensuelles de 2000
à 2024 », DARES : « Les mouvements de main-d’œuvre des salariés du privé –
octobre 2024 », Le Monde, Officiel CSE
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