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- Ordonnances Macron : rôle et fonctionnement du CSE (Partie 1)
PARTIE 1
3. Le rôle et le fonctionnement du CSE : entre appropriation et tensions
Dans le rapport intermédiaire du comité de 2020, plusieurs interrogations émergeaient du suivi de la création des CSE, à un moment où l’on disposait encore de peu de recul sur leur fonctionnement. Ces premiers éléments d’analyse, qui intervenaient au tout début de la mise en œuvre et donc avec un temps très limité d’appropriation disponible, mettaient en avant une instance mise en place avec un faible niveau de diagnostic préalable, un degré d’innovation hétérogène et souvent une mise en œuvre qui s’apparentait plutôt à une reproduction de fonctionnements antérieurs.
Le rapport formulait des interrogations sur les thèmes suivants : le rôle des élus au regard des moyens disponibles, le périmètre et l’éventuelle centralisation des instances (en particulier pour les grandes entreprises), l’articulation entre CSE et autres instances (CSSCT1, autres commissions, représentants de proximité) et la nature des relations entre les élus et les salariés. S’ajoutait une question conjoncturelle : comment la crise sanitaire a-t-elle mis à l’épreuve cette nouvelle instance ?
Pour apporter des éléments de réponse à ces questions, plusieurs types de sources de nature qualitative sont mobilisées ici :
‒ quatre rapports de recherche réalisés dans le cadre d’un appel à projets mené par France Stratégie pour le comité d’évaluation (annexe 4), que nous nommerons par simplicité dans la suite rapport IRERP CSO (coordonné par Cyril Wolmark et Jérôme Pelisse), rapport Ires (coordonné par Frédéric Lerais), rapport IRG-UPEC (coordonné par Rémi Bourguignon) et rapport CERCRID-Lyon2 (coordonné par Carole Giraudet), en référence aux structures de recherche de rattachement des responsables scientifiques2.
‒ des rapports de recherche réalisés dans le cadre d’un appel à projets mené par la Dares dans la suite de l’enquête Reponse3 ;
‒ plusieurs études et sondages (annexe 5) et différentes auditions menées par le comité.
Les différents rapports de recherche ont été réalisés avant ou pendant la crise (notamment pour les monographies en entreprise). Ces analyses portent sur des entreprises ayant mis en place des CSE avant crise mais parfois avec peu d’antériorité.
1 Commission santé et sécurité au travail
2 Les rapports sont disponibles sur le site de France Stratégie
3 Ces rapports sont disponibles sur le site de la Dares : voir Les relations de travail dans un contexte de réformes institutionnelles
Il est donc difficile de distinguer entre ce qui relève du fonctionnement antérieur et ce qui relève du fonctionnement concomitant à la crise. On présente donc ici des résultats généraux sur le fonctionnement des CSE, avant de faire un focus spécifique sur les enseignements liés uniquement à la crise, celle-ci étant non seulement un fait incontournable par sa concomitance avec l’instauration des CSE mais aussi un moment privilégié pour étudier leur mise à l’épreuve.
Par ailleurs, beaucoup de ces recherches portent sur des entreprises qui ont mis en place des CSE après négociation et signature d’accords, soit une minorité des entreprises concernées par la création d’un CSE, ce passage à la nouvelle instance pouvant se faire avec ou sans négociation d’un accord d’entreprise. L’équipe de l’IRERP a ainsi dénombré environ 8 600 accords de mise en place de CSE entre 2017 et 2020 (voir Encadré 3).
Encadré 3 – Estimation du nombre d’accords de mise en place du CSE
Dans le cadre du projet de recherche « Le représentant de proximité, une figure au cœur des enjeux de la nouvelle représentation des salariés » (voir annexe 4), une analyse des accords collectifs disponibles sur Légifrance a permis d’estimer le nombre d’accords d’entreprise mettant en place le CSE, puis le nombre d’accords mettant en place des représentants de proximité.
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3.1. La centralisation des instances : un phénomène à relativiser selon les types d’entreprises
La création des CSE s’est accompagnée, tout d’abord, dans les entreprises à structure complexe, d’une réflexion sur la définition des périmètres d’établissements distincts, permettant de définir le niveau et le nombre de CSE créés. Lorsque l’entreprise est divisée en plusieurs établissements distincts, la mise en place du comité social et économique (CSE) doit se faire au niveau de chacun de ces établissements. Un CSE central doit alors être créé au niveau de l’entreprise. Le nombre d’établissements distincts est fixé par accord, ou à défaut par l’employeur sur un critère « d’autonomie de gestion 1 ». Le rapport du comité d’évaluation de juillet 2020 mentionnait que dans de nombreux cas cités par l’étude Orseu-Amnyos2, le nombre d’établissements qui disposaient auparavant de comité d’entreprise propre a été réduit avec la mise en place du CSE, renforçant une tendance à la centralisation déjà observée avant la réforme3.
1 Cette notion « d’autonomie de gestion » est en partie seulement définie par la loi et la jurisprudence. Elle peut faire l’objet de difficultés et de désaccords d’interprétation, parfois de contestations juridiques.
2 Orseu-Amnyos (2019), Appropriation et mise en œuvre des ordonnances du 22 septembre 2017 réformant le droit du travail, étude réalisée pour le comité, septembre
3 Ires (coord.), Orseu, CEP-Alpha, Syndex, (2016), Évolution des comités d’entreprise : effets et usages des nouveaux outils de consultation issus de la Loi de sécurisation de l’emploi (LSE), rapport pour la Dares
Ce constat relatif à la centralisation peut être précisé et détaillé s’agissant de la reconfiguration des périmètres des CSE, notamment dans les entreprises de grande taille et à structure multisites. S’agissant d’une centralisation des instances, le rapport UPEC identifie trois configurations possibles :
‒ des nouvelles instances calquées sur les précédentes, marquant la volonté de maintenir dans un cadre institutionnel nouveau les pratiques en place ;
‒ un changement intermédiaire, avec une définition des établissements distincts qui reste inchangée (mêmes critères géographiques ou d’activité) mais le périmètre dans lequel les instances sont élues peut être modifié, avec une réduction du nombre de CSE concourant à la centralisation ;
‒ un changement plus lourd avec une modification de la définition des établissements distincts, par exemple via le passage d’une structuration géographique des établissements à une structuration par activité, ce qui renouvelle profondément le fonctionnement de la représentation du personnel.
La centralisation des instances peut être concomitante d’une centralisation des entreprises du point de vue de leur organisation et structure interne.
Ainsi, le rapport de l’Ires souligne que dans certaines grandes entreprises, les périmètres avaient bien souvent bougé avant les ordonnances, s’inscrivant dans un mouvement enclenché de longue date de recentralisation de la décision au sein des entreprises et accompagné par différentes réformes1 (voir annexe 6). Les ordonnances prolongent cette dynamique dans certaines entreprises, notamment dans les ETI, selon un mécanisme « d’isomorphisme institutionnel » : l’évolution des instances de représentation du personnel est, dans ces situations, calquée sur la transformation organisationnelle et productive de l’entreprise, et par conséquent sur celle de sa direction. La centralisation des CSE est notamment le fruit de cette tendance ancienne et antérieure aux ordonnances, avec la volonté des directions de faire correspondre les espaces de dialogue social avec les niveaux décisionnels de l’entreprise.
Une certaine centralisation peut être recherchée également parfois par les organisations syndicales quand se posent pour elles des difficultés à constituer des listes, ou dans un souci d’harmonisation des prestations liées aux activités sociales et culturelles, mais cela peut correspondre aussi à une difficulté pour les directions à décentraliser certaines ressources humaines.
1 Par exemple la mise en place, depuis la LSE de 2013 puis la loi Rebsamen de 2015, d’une consultation obligatoire sur la stratégie de l’entreprise a participé à cette tendance plus ancienne : la nécessité de trouver des interlocuteurs à même de porter ce dialogue pousse les partenaires sociaux à privilégier les instances les plus centrales (comités centraux) dans l’entreprise, où se situe le niveau jugé pertinent de pouvoir en la matière. Voir Ires (coord.) (2016), op. cit. ; Fleury N. et al. (2018), « Dialogue social sur la stratégie de l’entreprise : éléments de bilan et perspectives », Revue de l’Ires, n° 94-95, novembre.
Néanmoins, cette dynamique de centralisation n’est pas systématique et semble varier selon les secteurs : elle paraît moindre dans l’industrie, où la nécessité d’instances plus décentralisées est prise en compte par les acteurs, que dans les services. Elle est notamment limitée dans certains cas par la volonté de ne pas centraliser certaines questions au niveau d’un CSE central. Il peut y avoir en effet un tiraillement entre une volonté de proximité pour des questions SSCT ‒ et parfois pour les activités sociales et culturelles (ASC), avec des différences de gestion et de subventions selon les établissements ‒ et une logique de centralisation pour les prérogatives économiques qui sont toutes intégralement gérées par la direction générale. Cela peut expliquer que dans certaines entreprises les CSE s’établissent au final à un niveau intermédiaire, qui ne correspond à aucune direction.
La centralisation des instances qui concerne d’abord les grandes entreprises et celles à structure complexe a pu contribuer à la réduction du nombre d’élus, même si sa portée doit être nuancée, compte tenu du nombre d’entreprises qui sont mono-établissement et qui sont moins concernées par cette réduction du nombre d’élus.
3.2. Une rationalisation à analyser à l’aune du fonctionnement des CSE et de leurs nouvelles attributions transversales
L’un des objectifs de la réorganisation des instances au sein d’une instance unique était de simplifier leur fonctionnement et de rationaliser les moyens notamment par la réduction du nombre de réunions et pour éviter le traitement de mêmes sujets dans différentes instances (par exemple CE d’établissement/ CE central). Cette réorganisation impliquait ainsi une modification du nombre d’instances, et donc d’élus et de leurs moyens. Les premiers éléments de constats, présentés dans le rapport intermédiaire du comité de 2020, mettaient en lumière les inquiétudes des élus relatives à une diminution des moyens (réduction du nombre d’élus, des heures de délégation et du rôle des suppléants), sujet qui a été au cœur des négociations initiales sur la création des CSE. Les enquêtes et les travaux plus récents concernant des entreprises ayant mis en place un CSE actualisent et précisent cette question des moyens. Du côté des directions, cet objectif de rationalisation des moyens et du fonctionnement des instances grâce notamment à la possibilité de traiter dans un lieu unique les sujets et d’éviter les redondances est perçu comme atteint. Du côté des élus, on met surtout en avant la question du niveau et de l’utilisation des moyens disponibles au regard des nouvelles missions, plus larges et plus complexes des instances ; autant de contraintes renforcées pendant la période de crise sanitaire.
La discussion initiale sur les moyens a pu porter sur le nombre d’élus et plus souvent sur les heures de délégation attribuées aux différents élus, le deuxième élément pouvant venir pour partie compenser le premier, selon les dispositions législatives. L’existence de dispositions supplétives prévoyant une baisse du nombre d’élus a pesé fortement dans une négociation perçue comme « asymétrique1 », car pouvant être utilisée par les directions, y compris dans les cas où les accords négociés se situent finalement au- dessus de ce minimum (c’est le cas pour toutes les grandes entreprises étudiées dans le rapport UPEC mais rarement dans les PME étudiées dans le rapport du Cercrid – Lyon-2). La nature des négociations a été également très influencée par le contexte de l’entreprise (négociation plus ou moins large si concomitante par exemple avec une réorganisation2) et par le climat social antérieur. Ces négociations ont eu des durées variables et les stratégies des directions ont été diverses (volonté d’aller vite ou au contraire d’être plus attentistes).
Il n’est pas possible à ce jour de quantifier globalement l’impact que ce changement d’organisation des instances a pu avoir sur le nombre global d’élus. Les données issues de la base Mars sur les élections professionnelles permettraient potentiellement de dénombrer les mandats issus des élections de CSE mais de façon sans doute imparfaite : seule l’enquête Reponse qui sera réalisée en 2023 pourra fournir des données fiables sur le sujet. Le principal vecteur de la réduction du nombre d’élus est la fusion des anciennes instances au sein d’une seule qui cumule les anciennes attributions des comités d’entreprise avec celles des délégués du personnel et des CHSCT. Les travaux qualitatifs semblent montrer une hétérogénéité des situations, liée notamment à la taille des entreprises. Là où il y avait peu d’élus – par exemple dans les petites entreprises qui avaient uniquement un délégué du personnel, remplacé par un titulaire « CSE » – ou déjà une instance fusionnée avec une délégation unique de personnel, l’évolution quantitative a probablement été limitée. C’est dans les entreprises de taille intermédiaire et les grandes entreprises, où les délégués de personnel s’ajoutaient aux élus du comité d’entreprise et aux membres du CHSCT, que la réduction a pu être plus forte.
Dans les plus grandes entreprises, plusieurs cas de figure sont identifiés dans les rapports de recherche avec une diminution variable du nombre d’élus (liée au niveau de centralisation des instances), ou bien une relative stabilité des moyens mais avec une redistribution et une réallocation en fonction des réorganisations des instances (par exemple quand la création de représentants de proximité peut « compenser » pour partie la diminution du nombre global d’élus). La négociation des moyens associés au CSE doit alors être envisagée dans un ensemble plus vaste de négociations sur les moyens syndicaux et le dialogue social – parfois a posteriori de la mise en place du CSE – comme l’illustre l’analyse par l’Ires d’ensemble d’accords associés à des entreprises (accords de droit syndical, accords de méthodes, etc.).
1 Comité d’évaluation des ordonnances travail (2020), Rapport intermédiaire du comité d’évaluation, op. cit. Voir le graphique page 30 sur l’écart en nombre de titulaires dans les anciennes instances et nombre de titulaires du CSE, en application des dispositions supplétives du code du travail (art. L. 2314-1 du code du travail).
2 Le rapport UPEC met en lumière néanmoins l’importance du contexte de la négociation qui a pu permettre parfois que la négociation porte plus largement sur la réorganisation du dialogue social dans l’entreprise.
Quand des moyens supplémentaires ont été négociés, c’est le plus souvent pour des attributions spécifiques, liées à des fonctions ou mandats spécifiques reconnus par l’accord (secrétariat du CSE, trésorier, coordinateur syndical à un niveau central, etc.) ou liées à des thématiques et des processus décisionnels particuliers (frais et temps afférents aux réunions préparatoires, aux déplacements ou à la mise à disposition d’une assistance administrative, notamment pour les espaces de discussion qui ont lieu au niveau central de l’entreprise). Parfois ces moyens complémentaires ont été négociés aussi pour les représentants syndicaux, notamment au niveau central, en contrepartie de la baisse des moyens pour les élus (rapports UPEC et Ires). Se jouent alors éventuellement des enjeux de clé de répartition des moyens alloués aux syndicats selon leur représentativité, mais aussi des arbitrages entre moyens dédiés et enveloppes flexibles (d’heures de délégations par exemple) laissées à la main des organisations syndicales.
En pratique, la question des moyens se concentre sur le temps disponible pour les élus en poste pour effectuer leurs nouvelles missions, avec une perception qui semble s’améliorer pour les élus interrogés en 2021, si l’on compare avec les réponses données en 2018. Selon l’enquête Syndex, en 2021, 57 % des élus sont plutôt satisfaits de leur nombre depuis le passage au CSE (contre 49 %1 en 2018) et 57 % sont plutôt insatisfaits de leurs heures de délégation (contre 67 % en 2018). De plus, quand on interroge les représentants du personnel sur les principales inquiétudes vis-à-vis du CSE, en 2021, environ un quart des répondants mentionnent des items relatifs au manque de moyen ou de temps mais ces craintes sont en baisse significative par rapport aux années précédentes (voir Graphique 3). Ces résultats doivent être interprétés en tenant compte de la temporalité de l’étude. Le passage très récent dans un CSE pousse probablement à comparer avec le fonctionnement antérieur, comparaison qui s’estompe au fil du temps ; dans le même temps des formes d’adaptations aux nouvelles situations peuvent agir dans le même sens.
1 En décembre 2018, la question était posée uniquement à ceux dont l’entreprise était déjà passée en CSE. À noter que par ailleurs les élus expriment, très majoritairement (autour de 80 %) l’idée que leur nombre et les heures de délégation étaient plutôt satisfaisants avant réforme du CSE.
Cette question du temps peut être liée au nouveau fonctionnement des instances. L’instance unique CSE cumulant désormais les anciennes prérogatives des anciennes instances pour les traiter concomitamment, les réunions sont globalement moins fréquentes, conformément à l’objectif de rationalisation, ce qui représente une amélioration pour les directions. Mais de fait, elles sont aussi plus longues et avec des ordres du jour plus denses. Les monographies du rapport Ires mettent en avant que la sollicitation a surtout progressé dans le temps de participation aux instances (heures de « direction »), induisant, selon les élus, un moindre temps disponible pour préparer les réunions ou pour être en contact avec les salariés. Dans certaines entreprises, des phases de renégociation ont déjà eu lieu ou sont en cours, au regard des difficultés identifiées, et peuvent porter notamment sur la question des heures de délégation, d’évolution des périmètres et des moyens afférents, ou des questions plus pratiques (remboursement des frais kilométriques, mise en place de locaux, badgeage des membres du CSE, etc.)1.
La suppression de la possibilité pour les suppléants de participer aux réunions2 avait pour objectif de faciliter l’organisation des réunions et d’améliorer la qualité des échanges : elle contribuait ainsi à l’objectif de rationalisation. Mais les représentants du personnel soulignent que cela aboutit à renforcer la charge de travail des titulaires, à rendre plus difficile pour les suppléants leur association aux mandats et le suivi des sujets et leur préparation éventuelle à des mandats futurs3.
Cette période de début de fonctionnement des CSE fait apparaître surtout des difficultés d’adaptation et d’adéquation entre les moyens des élus, en particulier en temps disponible, et leurs nouvelles missions plus larges et plus exigeantes, dans une instance devant traiter conjointement différentes thématiques.
Apports et difficultés de la transversalité des CSE
1 Rapport UPEC
2 Les suppléants ne siègent désormais en réunion qu’en l’absence du titulaire, sauf si un accord le prévoit, mais ils doivent être destinataires des mêmes informations que le titulaire : ordre du jour, convocations (art. L. 2315-30 du code du travail)
3 Difficultés soulignées notamment par plusieurs rapports de recherche réalisés dans le cadre d’un appel à projets de recherche lancé par la Dares dans la suite de l’enquête Reponse 2017 (voir « Les relations de travail dans un contexte de réformes institutionnelles »), notamment les rapports CES et CSO
4 S’ajoutent désormais aussi les questions environnementales (depuis la loi Climat)
Pour les représentants de la direction, cela est souligné notamment comme un gain d’efficacité et une réduction des coûts (moins de réunions). Dans le rapport UPEC, il est mentionné aussi par les acteurs l’intérêt d’une instance CSE avec des échanges « moins cloisonnés » qu’avant, plus en position de « pilote », « vecteur central » ou « régulateur » que ne l’était l’ancien comité d’entreprise.
Cette transversalité peut être perçue également par certains élus, en particulier dans des grandes entreprises, comme une possibilité d’accéder à des informations et de gagner en coordination (volet qualitatif de l’enquête Syndex). « L’avantage du passage en CSE, c’est la mutualisation des informations : on a tous accès aux mêmes infos, c’est enrichissant ». « La fusion des missions au sein d’une seule instance permet d’éviter, dans une certaine mesure, des effets “ping pong” comme ceux qui consistent à renvoyer les questions CSE aux questions DP par exemple » (rapport Ires).
Mais cette transversalité apparaît aussi, à ce stade, comme une exigence supplémentaire pour ces élus, malgré les possibilités existantes selon la loi de recourir à l’expertise, à la formation ou aux informations disponibles dans les BDES. Alors que par le passé ils pouvaient se spécialiser dans le traitement de certains sujets (la santé/ sécurité au travail, le traitement des questions individuelles ou encore les activités sociales et culturelles) par le choix d’un mandat dans une instance particulière, les nouveaux élus peuvent être sollicités sur plus de sujets à la fois techniques ou stratégiques dans l’instance unique, même si une répartition des sujets reste possible entre élus1.
L’enquête Syndex réalisée à trois reprises depuis 20182 rend compte, après une première période de fonctionnement des CSE, de cette difficulté d’une maîtrise technique par une même personne de sujets plus nombreux et plus divers. Les réponses « un affaiblissement du poids des représentants du personnel face à celui de la direction dans la nouvelle structure », « un accroissement de l’investissement temps nécessaire pour les élus » et « une moins bonne prise en compte des enjeux santé au travail » restent en tête des réponses données, la réponse « un déficit d’expertise des représentants du personnel » est la seule qui progresse notablement.
1 Cela a pu amener des salariés à ne pas vouloir se présenter dans une telle instance commune, ou à ce que les nouveaux mandats soient plus souvent occupés par d’anciens élus au CE que d’ex-représentants CHSCT ou délégués du personnel
2 En décembre 2018, en novembre 2019 et en mars 2020
Lecture : 21 % des répondants (qui sont des représentants du personnel) ont cité un affaiblissement du poids des représentants du personnel face à celui de la direction dans la nouvelle instance comme première inquiétude vis-à-vis du CSE
Champ : population salariée travaillant dans le secteur privé dans des entreprises de plus de 50 salariés
Source : sondage Ifop pour Syndex, édition mars 2021 (questions posées en janvier et février 20
Cette contrainte est perçue aussi par les représentants des directions (volet qualitatif de l’enquête Syndex) : « le risque, c’est qu’on se retrouve avec des représentants moins préparés, c’est incontestable. C’est un vrai sujet pour nous aussi ».
L’enjeu de compétences face à cette exigence de transversalité existe tout autant du côté des représentants des directions, même s’il est moins mis en avant dans le cadre de la réforme des CSE que pour les élus. La capacité ‒ et dans certains cas la volonté ‒ d’articuler des registres relevant des conditions de travail, des relations salariales et des enjeux économiques de l’entreprise est un défi pour l’employeur, figure qui, excepté dans les petites et moyennes entreprises, implique en réalité différents interlocuteurs, des services RH – bien souvent principaux animateurs du dialogue – aux dirigeants en charge de la stratégie en passant par les responsables financiers et les directions opérationnelles de site, voire le management intermédiaire.
Cette nouvelle approche induite par les CSE d’un traitement conjoint et transversal de sujets multiples soulève des difficultés différentes selon les thématiques, difficultés qui pouvaient préexister mais qui se renforcent pour les acteurs devant les traiter conjointement.
La maîtrise des questions économiques pose des questions spécifiques qui ne sont pas dues en soi aux ordonnances mais qui peuvent être renforcées dans un contexte d’instance unique et de traitement transversal des sujets. Elles nécessitent des compétences spécifiques et des formations techniques qui ne sont pas toujours accessibles aux élus. Elles posent aussi la question de l’accès à l’information sur la situation économique de l’entreprise, qui renvoie à la fois à la possibilité de mobiliser une expertise extérieure et aux difficultés d’utilisation des BDES (bases de données économiques et sociales) quand elles sont disponibles et alimentées. Ces contraintes peuvent aboutir à une concentration et à une centralisation des sujets économiques par un nombre limité d’élus, d’autant plus quand ces sujets sont traités au niveau central de l’entreprise (avec un risque de distanciation accrue avec les salariés). Ces questions renvoient donc à la fois au sujet de l’appropriation de ces nouvelles missions par les élus et de leur accès à la formation.
Le rapport Les IRP face aux questions économiques1, publié en 2020, mentionne ces difficultés et souligne les questions de positionnement que cela peut soulever pour les élus : « Les ambiguïtés du passage d’un rôle de contrôle de la décision à l’implication dans la décision » et l’existence d’une « tension entre, d’une part, le rôle de contrôle de la décision économique prise par l’employeur et, d’autre part, celui de l’implication des syndicats dans les processus de décision notamment dans le cadre des négociations liées à la compétitivité de l’entreprise ». La question du traitement des questions économiques renvoie ainsi plus largement à la question du rôle des élus du personnel et de leur association aux discussions stratégiques de l’entreprise, par la prise en compte de leur avis exprimé dans le cadre du CSE, et, le cas échéant en application des dispositions relatives à la possibilité de mettre en place un conseil d’entreprise (voir Encadré 4 sur les conseils d’entreprise et la discussion sur la notion de « codétermination »2).
1 Tainturier P., Thobois P. et Bourguignon R. (2020), Les Institutions représentatives du personnel face aux questions économiques, IAE Paris/Ires/CFDT, septembre. Cette étude a été réalisée sur la base d’entretiens avec des représentants de salariés et d’employeurs dans sept entreprises (PME et grandes entreprises) et des représentants de structures syndicales extérieurs aux entreprises et cabinets d’experts.
2 Voir aussi le rapport de recherche de l’UPEC (conclusion) qui distingue rationalisation formelle du dialogue social et rationalisation matérielle « qui viserait à donner à ses protagonistes davantage de prises sur les transformations économiques et sociales (et qui) demeure aujourd’hui largement en germes, tant l’essentiel des transformations paraissent relever soit de l’information-consultation, soit de la décision unilatérale ».
Dans les PME étudiées par Lyon-2, le traitement des questions économiques et stratégiques reste très faible, en raison de difficultés pour les élus de disposer des informations nécessaires de la part des directions et, dans certaines configurations, d’une distance importante entre les IRP et les lieux effectifs de décision sur ces questions stratégiques. Cette faible articulation des enjeux stratégiques, économiques et sociaux n’est pas nouvelle, mais le constat fait dans ces entreprises est que la densification de l’ordre du jour dans les nouvelles instances peut renforcer cette difficulté, en ne permettant pas l’approfondissement de certains sujets qui restent traités de façon trop formelle. Cependant ces questions économiques ne relèvent pas formellement des prérogatives des entreprises de moins de 50 salariés.
Pour les questions santé et sécurité au travail, la suppression des CHSCT en tant qu’instance autonome et son remplacement1 le cas échéant par des commissions de santé sécurité et conditions de travail (qui désormais émanent du CSE et n’ont plus la personnalité morale et juridique2) a suscité également des inquiétudes fortes lors de la création des CSE.
En termes de couverture des salariés par des instances spécifiques sur ces questions santé et sécurité, celle-ci était en baisse en 2019 par rapport à la période antérieure aux ordonnances, y compris pour les entreprises de 300 salariés ou plus (pour lesquelles la création d’une telle commission est obligatoire) (voir Encadré 2 supra). Mais ces données doivent être considérées avec prudence et surtout complétées par celles concernant l’année suivante (qui seront disponibles en 2022), pour vérifier si la baisse de couverture des salariés est avérée, car une part des CSSCT n’a pu être mise en place qu’en 2020. Il convient de préciser également qu’en l’absence d’instance spécifique, les élus des CSE comptent parmi leurs prérogatives une mission générale en matière de santé, sécurité et conditions de travail.
La logique des ordonnances a été de confier aux négociateurs d’entreprise une grande latitude dans la façon de structurer, au travers des commissions du CSE, dont la CSSCT, le traitement et l’articulation de différentes thématiques, comme pour les représentants de proximité. Latitude dont les négociateurs se sont semble-t-il peu emparé, ce qui peut donner lieu à des instances dont le rôle reste à définir et à préciser (rapport Ires). L’une des difficultés est de définir l’articulation de ces commissions avec le CSE : elles peuvent avoir un rôle utile de préparation des débats en amont (mais avec un risque de répétition dans les deux instances) ou une plus grande autonomie et latitude d’action (mais avec le risque que ces questions soient marginalisées hors du CSE). « Pour nombre de représentants du personnel, le passage du CHSCT à la CSSCT représente une perte de pouvoir et d’autonomie dans le traitement des questions SSCT et impose aux élus de solliciter le CSE pour voir les sujets pris en compte. Tandis que du côté des directions, la suppression des CHSCT permet d’être plus efficace dans le traitement des questions HSCT avec moins de « blocages ». Des directions interrogées dans le rapport UPEC soulignent également que le fonctionnement en commission de la CSSCT, moins formalisé que l’ancien CHSCT (notamment car il n’y a plus de vote et de procès-verbaux), permet de préparer les sujets avant leur traitement en CSE, facilite les échanges et rend plus fluide l’examen des dossiers.
1 Avant les ordonnances de 2017, la désignation d’un CHSCT, par les représentants du personnel élus, était obligatoire dans les entreprises de 50 salariés ou plus. En vertu des ordonnances de 2017, le CSE, mis en place dans les entreprises de 11 salariés et plus reprend les attributions des anciens CHSCT. Dans les entreprises de 300 salariés ou plus, une commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) doit être créée (ainsi que dans certains établissements présentant des risques particuliers tels que ceux classés « SEVESO »).
2 Les CSSCT sont des commissions du CSE. Elles ne peuvent donc pas directement ester en justice, ni faire appel à un expert, compétences qui relèvent du CSE.
Le périmètre des CSSCT peut changer par rapport aux anciens périmètres des CHSCT. Dans les entreprises étudiées par l’Ires (et rapport UPEC), le nouveau périmètre est plus large et correspond parfois à un nouveau découpage avec des CSSCT sur des bases géographiques ou par métier (p. 83). Ce changement de périmètre soulève la question pour les élus du manque de proximité avec les salariés.
Dans les PME étudiées par Lyon-2, non soumises à l’obligation de créer une CSSCT, le traitement de ces questions de santé et sécurité reste difficile pour les élus. Les constats qui avaient été faits au sein des CHSCT demeurent vrais avec les CSE : le traitement de ces sujets est souvent formel, technique, normatif et simplement dans une logique informative descendante, sans qu’une réflexion soit menée sur les situations de travail et l’organisation de celui-ci. Ce constat est la plupart du temps ancien et antérieur à la création des CSE, mais la nouvelle organisation, y compris dans les entreprises ayant fait le choix de créer des CSSCT, n’a pas apporté d’amélioration sur ce point. D’autant que dans ces entreprises étudiées, les élus siégeant désormais en CSE sont plus souvent des anciens élus de CE qui ont moins d’intérêt et d’expertise pour ces sujets que les anciens élus des CHSCT.
Une transversalité qui induit un renforcement de la professionnalisation et des exigences nouvelles pour les élus
Cette transversalité se traduit aussi par une concentration des missions et des moyens sur quelques élus, avec une « professionnalisation » de ceux-ci. Au cours de ce premier mandat, dans les entreprises étudiées par l’Ires, le constat est fait, conformément à l’objectif d’une instance unique et transversale, d’élus titulaires très investis et qui concentrent l’ensemble des missions, alors que par le passé les rôles se distribuaient plus entre les élus des CE et les anciens délégués du personnel « qui déchargeaient les élus du CE de toute une série de tâches quotidiennes ». Parmi ces élus fortement engagés et qui concentrent les moyens (notamment grâce aux possibilités de mutualisation des heures) émergent en particulier les secrétaires de CSE qui jouent de plus en plus un rôle clé, notamment en maîtrisant l’ordre du jour de l’instance. Selon l’Ires, dans ces grandes entreprises « on assiste à un net renforcement des structures pyramidales de la représentation du personnel avec au sommet les délégués syndicaux centraux, ensuite les secrétaires de CSE et membres du secrétariat, puis les autres élus titulaires et enfin les représentants de proximité ou les délégués syndicaux chargés en particulier de remonter les questions individuelles et collectives ». Les élus consacrent alors plus de temps aux instances et à leur préparation et de fait moins de temps aux salariés (rapport Ires). Cette professionnalisation des élus a tendance également dans les grandes entreprises à renforcer le rôle des organisations et des délégués syndicaux.
Le rapport UPEC questionne également ce sujet de la professionnalisation des représentants du personnel, en soulignant qu’il s’agit d’une question ancienne mais renouvelée avec le fonctionnement des CSE. Les élus font état d’un ressenti du travail plus exigeant, plus lourd et plus complexe et par ailleurs d’une difficulté à préciser les compétences nouvelles requises par ces nouveaux mandats. « Le constat avancé est celui d’un manque de temps, couplé à des moyens jugés insuffisants pour pouvoir réaliser correctement et pleinement le travail demandé. Dans ces situations, les représentants du personnel estiment ne pas pouvoir tout faire et devoir « faire du tri » entre les dossiers et les sujets ». Dans les PME étudiées par la recherche Lyon-2, « les représentants du personnel [qui pour beaucoup se sont d’abord engagés uniquement sur la question de la gestion des activités sociales et culturelles] découvrent une fois qu’ils sont élus l’importance et la complexité du travail nécessaire à la réalisation des missions attribuées au CSE ». Ils expriment des contraintes de différents ordres : une tension entre la nécessité d’assurer au mieux son mandat de représentation et la nécessité d’assurer son travail dans des conditions acceptables par sa hiérarchie1, par ses collègues et par soi- même. Et par ailleurs, une difficulté liée à la relation avec les salariés : « difficultés d’accès aux situations de travail, manque de méthodologie de recueil et d’analyse des ressentis des salariés » et difficulté à transformer des questions individuelles en enjeux collectifs. Pour ceux qui ne sont pas de nouveaux élus, ces tensions existaient auparavant mais ont été renforcées selon eux par le champ plus large attribué au CSE et parfois par un sentiment de manque d’utilité et de légitimité lié à de nouvelles instances dont le rôle est mal identifié (dans des PME où le CSE remplace le délégué du personnel par exemple).
1 Les ordonnances travail prévoient un entretien de début de mandat pour les représentants du personnel, à leur demande, avec leur employeur, portant sur les modalités pratiques d’exercice de son mandat en entreprise au regard de son emploi portant sur les modalités pratiques d’exercice de ce mandat (art. L. 2141- 5 du code du travail)
Ce sentiment de complexification du rôle des élus s’accompagne aussi, selon les représentants du personnel, de difficultés pour recourir à l’expertise, dont les règles de financement ont été modifiées avec une participation accrue du CSE. Ainsi, par exemple, le rapport CES (post-enquête Reponse 20171) note un moindre recours à l’expertise dans plusieurs des entreprises étudiées, ce qui est perçu comme une diminution des ressources et de l’accompagnement pour les élus. Dans le rapport Lyon-2, les accords étudiés (environ 300 accords de PME ETI de la région Auvergne-Rhône-Alpes) renvoient en général uniquement aux dispositions du code, sans prévoir de moyens supplémentaires.
Cette technicisation du rôle des RP peut avoir une autre conséquence redoutée par les élus, sur l’attractivité des mandats électifs. Plusieurs rapports mentionnent ces difficultés renforcées pour les élus et les représentants syndicaux de recruter de nouveaux salariés lors du renouvellement des instances, la charge de travail et le niveau d’exigence paraissant trop élevés, dans un contexte de discrimination syndicale perçue ou réelle2. De ce point de vue, la suppression de la possibilité pour les suppléants de participer aux réunions (donc de se former sur leurs missions) est régulièrement mise en avant par les élus comme un facteur de démotivation des suppléants et de difficultés de recrutement de nouveaux élus (rapports Ires, UPEC), et ce malgré les dispositions prévoyant que les suppléants soient également destinataires des ordres du jour des réunions.
Lors du premier cycle d’élections des CSE, y compris dans des situations où le nombre de siège diminue, le taux de renouvellement des élus, même s’il ne peut être mesuré globalement pour l’instant, a été semble-t-il assez important. D’après l’enquête Syndex, les personnes interrogées mentionnent des équipes mixtes composées d’anciens et de nouveaux représentants pour 67 % des cas, des équipes fortement renouvelées pour 23 % des cas et des équipes restées à l’identique pour 10 % des cas. Ce taux de renouvellement interroge dans un contexte de contraction du nombre de mandats et pose la question du devenir des anciens élus dont le mandat n’a pas été renouvelé.
Les monographies mettent en avant l’épuisement – renforcé par la crise mais existant aussi par ailleurs – et le découragement de nombre d’élus, certains se mettant en retrait de leur fonction et d’autres démissionnant explicitement en cours de mandat, dans les grandes entreprises comme dans les PME.
La question du renouvellement des instances pour le deuxième mandat des CSE sera un enjeu important.
1 Thévenot N. (coord.) (2021), Entreprises « éclatées » et périmètre de la représentation collective, Rapport d’études, n° 09, Dares, septembre
2 Bourdieu J., Breda T. et Pecheu V. (2021), Étudier les représentants du personnel pour mieux comprendre les relations de travail et les conditions du partage de la valeur ajoutée, Rapport d’études, n° 013, Dares, septembre
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