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- Ordonnances Macron : rôle et fonctionnement du CSE (Partie 2)
PARTIE 2
3.3. La question majeure de la proximité encore non résolue
La fusion des instances – et donc la fusion des anciennes attributions des délégués du personnel et des CHSCT avec celles du comité d’entreprise – et leur centralisation, associées à une « professionnalisation » des élus, font de la gestion de la proximité et du lien entre les instances et les salariés des enjeux majeurs, actuellement non résolus dans certaines entreprises, y compris quand le sujet a fait partie de la négociation initiale.
Dans l’enquête Syndex, quand on interroge les représentants du personnel sur leurs inquiétudes vis-à-vis du CSE, 25 % d’entre eux (total des citations) mentionnent « une perte de proximité des élus par rapport aux salariés » (contre 28 % en 2018 et 24 % en 2019).
Dans les monographies se pose en particulier la question de la prise en charge des réclamations individuelles et collectives, anciennement du ressort des délégués du personnel et qui relèvent désormais des prérogatives des CSE. Des dysfonctionnements ou difficultés liés à cet exercice ont motivé la réforme et la suppression du statut de délégué du personnel. Mais le fonctionnement des nouveaux CSE, l’organisation de leurs réunions et leurs ordres du jour contraints ne permettent souvent pas, selon les élus, d’y répondre de façon satisfaisante. La prise en charge de ces questions se trouve alors transférée hors du CSE, vers les représentants de proximité ou des commissions spécialisées, quand ils existent. Ailleurs, et là encore s’ils sont présents, ce sont plutôt les délégués syndicaux qui prennent en charge ces questions.
Un faible recours aux représentants de proximité
Pour répondre à ces enjeux, les ordonnances ouvrent la possibilité de créer des représentants de proximité mais uniquement par accord1, et en laissant toute latitude sur la définition de leur rôle, de leurs moyens et de leur fonctionnement.
ement.
Entre septembre 2017 et décembre 2019, le constat est fait que les partenaires sociaux se sont peu saisis de ce dispositif : seuls 2 142 accords de mise en place de représentants de proximité sont repérés par le rapport IRERP-CSO. Parmi les CSE mis en place par accord2, seuls 25 % environ de ces accords instaurent également des représentants de proximité. Cette relative absence des représentants de proximité peut s’expliquer par plusieurs éléments. La pertinence de la création de représentants de proximité et de l’utilité de cet échelon se posent d’abord différemment selon la taille des entreprises mais aussi son organisation (par exemple, selon le nombre d’établissements et le fonctionnement plus ou moins centralisé de l’entreprise).
1 Plus précisément, le code du travail précise qu’un accord qui détermine le nombre et le périmètre des établissements distincts (art. L. 2313- 2) peut mettre en place des représentants de proximité (art. L. 2313-7 al. 1). Ce qui pose la question d’une entreprise qui voudrait créer, par exemple en cours de mandat, des représentants de proximité sans avoir conclu ce type d’accord et de la possibilité de le faire par un autre type d’accord. L’équipe du projet IRERP-CSO n’a pas trouvé, au moment du dénombrement dans la phase initiale, d’accord de mise en place de représentants de proximité sui generis (qui ne soit ni un avenant à un accord relevant de l’art. L. 2313-2, ni une partie de cet accord).
2 Voir Encadré 1 sur dénombrement des accords CSE
Ensuite, plusieurs motifs peuvent être aussi identifiés : le refus de l’entreprise (pour éviter notamment de reconstituer l’ancienne fonction de délégué du personnel), le souhait des négociateurs de gérer autrement la question de la proximité et parfois le souhait de mettre en place ces représentants plus tardivement après avoir établi un bilan du fonctionnement du ou des CSE dans l’entreprise et selon les besoins.
La création des représentants de proximité passe nécessairement par accord. Dans 78 % des cas, les accords sont signés à l’échelle de l’entreprise, par des délégués syndicaux1, avec le plus souvent une durée d’application indéterminée. Logiquement, les représentants de proximité se retrouvent principalement dans de grandes entreprises, avec tout de même presque un quart des accords signés dans des structures comptant moins de 300 salariés.
1 Les organisations syndicales ont des taux de signature similaires, toujours au-dessus de 60 %
Lecture : 24 % des accords de mise en place de représentants de proximité ont été signés dans des unités rassemblant moins de 300 salariés
Champ : accords de mise en place de représentants de proximité enregistrés et publiés par l’administration au 31 décembre 2019
Source : échantillon d’accords de mise en place de représentants de proximité, apparié à la Base statistique des accords d’entreprises, Rapport IRERP-CSO
Les principaux secteurs d’activité dans lesquels sont introduits des représentants de proximité sont l’administration publique, la santé humaine et l’action sociale, l’industrie manufacturière, les activités spécialisées, scientifiques et techniques, le commerce et les transports. Parmi ces secteurs, certains sont déjà caractérisés par une forte activité conventionnelle comme l’industrie manufacturière. Toutefois, d’autres secteurs sont surreprésentés dans les accords de mise en place de représentants de proximité en comparaison de leur part dans le nombre d’accords collectifs d’entreprise en 2018 et 2019 : c’est le cas pour la santé humaine et l’action sociale, l’administration publique, les transports et l’hébergement-restauration.
Différents types de représentants de proximité qui font ressortir différentes conceptions de la proximité
Ce nouveau mandat se caractérise avant tout par un éclatement des situations – en termes de moyens, périmètres, attributions, degrés de formalisation, etc. – dont il est tout de même possible d’extraire différents types de représentants de proximité.
Le premier correspond en réalité à un type d’accords qui instaurent des représentants de proximité mais ne donnent aucune précision quant aux prérogatives, moyens et conditions de mise en place de ce nouveau mandat, dont les modalités sont laissées à l’informalité des relations quotidiennes en entreprise.
Le deuxième type fait apparaître des représentants de proximité conçus comme compléments ou relais au CSE, des « super-élus »1 mis en place au niveau des établissements distincts, dont le mandat est parfois cumulé avec celui d’élus et qui disposent de peu voire pas d’heures de délégation mais de prérogatives larges comparables à celles d’un élu CSE, avec qui l’accord prévoit des liens sans qu’il y ait nécessairement de réunions avec la direction.
Troisièmement, les représentants de proximité peuvent être pensés comme des correctifs à la centralisation de la représentation du personnel, dans la volonté de recréer les anciens délégués du personnel, sans qu’ils disposent de la même autonomie (instaurés à des niveaux plus restreints que le ou les CSE2, leurs prérogatives et parfois leur nombre reprennent ceux des anciens délégués du personnel, mais sans heures de délégation – ou très peu – ni réunions avec les directions).
Enfin, un dernier type traduit une nouvelle approche de la représentation du personnel, dans laquelle les représentants de proximité constituent des mandats spécialisés dans le traitement de telle ou telle problématique et disposent d’une certaine souveraineté dans une chaîne de dialogue social où s’articulent de façon sophistiquée les échelles locale et centrale de l’entreprise. Ce dernier type de représentant de proximité disposant souvent de moyens étendus est mis en place dans toute l’entité et exerce son mandat sur un périmètre plus restreint que celui du CSE.
1 Voir le rapport Ires, partie 2
2 Ce cas de figure se retrouve dans 69 % des accords
Avec ces façons multiples d’introduire les représentants de proximité, ce sont différentes conceptions de la proximité qui ressortent : géographique (pensée en termes de périmètres de représentation avec des représentants de proximité mis en place au même niveau ou à un niveau plus restreint qu’une autre instance comme le CSE), relationnelle (une attention particulière est portée au taux de couverture des salariés de ce nouveau mandat, bien qu’il soit souvent très élevé avec dans 40 % des cas un représentant de proximité pour 100 salariés), ou encore fonctionnelle (les prérogatives reflètent les problématiques quotidiennes des salariés, avec environ la moitié des accords qui attribuent aux représentants de proximité des missions spécifiques, qui peuvent ou non se coupler avec celles observées le plus souvent de santé et sécurité et de traitement des réclamations individuelles ou collectives).
Si environ 76 % des accords prévoient des heures de délégation pour les représentants de proximité, le constat global reste celui de la faiblesse des moyens (si on compare avec un mandat d’élu ou de celui d’un ex-délégué du personnel) – avec des crédits d’heures mensuels faibles (25 % des accords qui en octroient, prévoient moins de 5 heures mensuelles). De plus, presque un quart de l’ensemble des accords ne prévoit pas d’heures de délégation. Aux alentours des deux tiers des accords ne mettent pas à disposition des représentants de proximité des moyens de communication avec les salariés, la même proportion ne prévoit aucune formation et n’évoque pas de liberté de circulation. Beaucoup d’accords se caractérisent donc par une relative imprécision sur les moyens ou les attributions des représentants de proximité. La figure de ces derniers est ainsi largement tributaire de ce qu’en font les acteurs qui l’investissent, avec au premier rang les organisations syndicales. De plus, la formalisation des fonctions des représentants de proximité ne garantit pas la mise en œuvre efficace ou tout du moins satisfaisante pour les acteurs de ce nouveau mandat : pas de candidat à la fonction, difficulté à trouver son rôle face à la direction, difficulté à établir un lien avec les salariés, organisation du travail qui complique la prise d’heures de délégation pourtant autorisées, etc. Ainsi, si la santé et la sécurité font partie des prérogatives des représentants de proximité dans 81 % des accords, les représentants de proximité sont absents de la gestion de la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19 de manière quasi systématique dans les analyses monographiques menées, alors même que cette crise a exacerbé les enjeux de proximité auxquels font face les représentants du personnel.
Les autres façons de gérer la proximité
Le dispositif des représentants de proximité n’est pas la seule option possible pour appréhender la question de la proximité. D’autres formes de prise en charge ont pu être pensées (rapports IRERP, CSO, Ires) :
‒ création des commissions spécifiques (sur les réclamations individuelles et collectives par exemple) ;
‒ des référents hygiène et sécurité ;
‒ des stratégies de composition des listes par les organisations syndicales pour assurer une représentation équilibrée des sites ou catégories professionnelles ;
‒ dans certains cas, le recours aux nouvelles technologies de communication (réseaux sociaux notamment) qui permet d’assurer une proximité à distance.
Dans les grandes entreprises s’est posée en particulier la question de la poursuite ou de la création de commissions avec des interrogations sur leur rôle et leur articulation avec les CSE. Ces commissions ont pu être considérées par les directions comme un enjeu important pour approfondir les débats, traiter des aspects techniques, dégager des positions communes, afin de traiter les sujets concernés plus rapidement et plus efficacement en CSE. Selon les témoignages des acteurs concernés, cette volonté initiale ne garantit pas pour autant un bon fonctionnement : dans de nombreux cas étudiés (UPEC), la mise en place est laborieuse, le niveau des engagements des acteurs variable et les commissions peuvent être un enjeu dans les relations intersyndicales (notamment pour leur composition). La question de l’articulation entre ces commissions et le CSE n’est pas réglée, le travail de coordination entre instances obligatoires et facultatives est une charge de travail importante, que n’a pas fait totalement disparaître la fusion des anciennes instances. Le rapport de l’Ires constate que dans les grandes entreprises étudiées, le nouveau système de représentation du personnel, avec différents niveaux (CSE central/ CSE d’établissements et commissions à différents niveaux) est parfois finalement très complexe, malgré l’objectif initial de simplifier les instances.
Ces différentes formes de dialogue de proximité sont inventées avec un degré d’institutionnalisation variable (d’une instance formelle à un traitement au fil de l’eau avec le management). Ce moindre formalisme – avec en particulier la suppression des registres de questions écrites – pose des difficultés selon les élus pour pouvoir rendre compte de leur mission et assurer leur légitimité. Du côté des directions, on souligne que les nouvelles formes de gestion de la proximité (notamment les représentants de proximité) ont permis de supprimer le formalisme des anciennes réunions de délégué du personnel.
Une prise en charge des questions de proximité qui concourt à redéfinir et à renforcer le rôle des délégués syndicaux
La fusion des instances et la suppression du rôle spécifique des délégués du personnel peut aboutir aussi dans les entreprises où ils sont présents à redéfinir et à renforcer le rôle des délégués syndicaux. Selon le rapport de l’Ires, le délégué syndical apparaît comme une « figure centrale en progression ». D’une part parce que, lors de la négociation, des moyens supplémentaires ont pu être attribués au droit syndical alors que les moyens des instances étaient en diminution, et d’autre part parce qu’en l’absence d’instance localisée, les délégués syndicaux se chargent, dans ces grandes entreprises, d’organiser la remontée des informations de terrain. Le rapport IRERP-CSO souligne que le rôle des organisations syndicales se trouve renforcé d’une part par le fait que la réduction du nombre de mandats se traduit par une concentration de ceux restants sur des anciens élus souvent syndiqués et d’autre part par le fait que les réseaux militants (anciens représentants du personnel, militants syndicaux, etc.) se retrouvent à pallier l’absence de représentants de proximité sur le terrain, pour servir de relais entre représentants et salariés, en s’appuyant sur leur expérience et leur formation syndicale, mais sans moyens spécifiques ni statut de salarié protégé.
Encadré 4 – Le conseil d’entrepriseEn alternative au CSE, les ordonnances de 2017 créent le conseil d’entreprise (CE). Collectif élu par les salariés, ses prérogatives sont équivalentes à celles d’un CSE (information-consultation sur les mêmes sujets). Il est en charge de la négociation et de la signature d’accords collectifs dans l’entreprise. Il peut aussi valider ou invalider les décisions de l’employeur sur certains thèmes (déterminés ex ante par voie conventionnelle, avec a minima celui de la formation professionnelle), par la procédure d’avis conforme. Le dispositif vise en particulier les TPE-PME, dans l’esprit d’une rationalisation des instances représentatives du personnel, d’un élargissement du statut de négociateur dans l’entreprise à d’autres personnes que le délégué syndical, souvent absent de ces structures, et d’une meilleure implication des salariés dans la gouvernance de l’entreprise, voire d’une « codétermination » comparable au Betriebsrat allemand. À la fin de l’année 2020, seule une petite vingtaine d’entreprises – principalement des PME – se sont dotées d’un conseil d’entreprise1. Ce faible recours s’explique en partie par le fait que le principal attrait du CE – la fusion des instances représentatives du personnel – est déjà rendu obligatoire par les ordonnances de 2017 avec le passage des CE au CSE. De même, en l’absence de délégué syndical, il est possible dans les petites entreprises de faire ratifier les textes par référendum directement auprès des salariés. D’autres pistes d’explication à ce faible recours résident dans la faible incitation pour les employeurs à négocier avec un collectif d’élus – dont la question des compétences n’est pas réglée par les ordonnances –, et dans leur faible appétence pour la codétermination en général, mais aussi dans la faible propension des délégués syndicaux à renoncer à leur monopole de négociation sans contrepartie ou compensation offerte par les ordonnances. Issues de secteurs variés, les entreprises ayant choisi ce dispositif se caractérisent par une pratique régulière de la concertation avec les représentants du personnel, la présence de personnes ayant une appétence pour le dialogue social, qui souhaitent gagner en autonomie vis-à-vis de l’accompagnement de la branche professionnelle ou de l’autorité publique (en période de crise sanitaire notamment). L’entreprise y est pensée comme une communauté que priorisent les délégués syndicaux (lorsqu’ils existent) par rapport à la fédération militante. Les accords – signés à parts égales par le CSE ou des délégués syndicaux – sont souvent identiques d’une entreprise à l’autre et rappellent plus un règlement intérieur qu’un dispositif négocié : les moyens mis à disposition des élus du CE sont très limités et les clauses ne se concentrent que sur leurs devoirs, sans contrepartie du côté employeur. Dans la plupart des cas, le conseil d’entreprise n’est ainsi pas pensé comme les prémisses d’une codétermination. L’avis conforme concerne très majoritairement le thème obligatoire (la formation professionnelle) et, dans deux cas, l’égalité femmes-hommes. Il prend de fait la forme d’une procédure de validation de la décision de l’employeur en lieu et place d’une association des élus aux processus de décisions. De plus, le conseil d’entreprise ne semble pas avoir dynamisé la pratique de négociations collectives formalisées aboutissant à une plus grande signature d’accords. Ainsi, trois ans après l’adoption des ordonnances, les conseils d’entreprises n’apparaissent pas comme l’instance privilégiée dans les TPE-PME. Ils ne semblent pas non plus s’inscrire dans une démarche de codétermination. Au-delà de ce constat, de nombreuses interrogations relatives à une certaine ambiguïté du dispositif persistent : articulation entre la procédure d’avis conforme et la négociation collective, rôle de l’employeur qui préside le CE mais négocie également avec l’instance, compétences et formation des élus en tant que négociateurs, sans appui d’une organisation syndicale, inscription dans les ordonnances d’un thème obligatoire pour l’avis conforme (la formation professionnelle) plutôt qu’une liste de thèmes à négocier au niveau de l’entreprise, peu de place laissée à l’expérimentation dans le code du travail, etc. |
1 Les premiers éléments sur les conseils d’entreprises esquissés ici se fondent sur une enquête menée par Christian Thuderoz en novembre 2020 fondée sur l’analyse des 17 accords de mise en place d’un conseil d’entreprise repérés et sur la conduite d’entretiens dans 9 des entreprises concernées
3.4. Le rôle des CSE pendant la crise du Covid
Comme le soulignait le précédent rapport du comité, la crise sanitaire a constitué une mise à l’épreuve directe des CSE, conçus pour traiter des questions de santé et sécurité au travail en lien avec les enjeux économiques. D’autant que cette crise est survenue alors que beaucoup de CSE venaient d’être créés.
Encadré 5 – Dispositions sur le dialogue social en période d’état d’urgence sanitaireLe développement de la visioconférence pour les réunions du CSE et les négocia- tions collectives a été encouragé pendant la période d’état d’urgence sanitaire. Il était possible de réunir le CSE et ses commissions en visioconférence, en conférence téléphonique ou par le biais de la messagerie instantanée sans limitation (disposition en vigueur jusqu’au 30 septembre 2021). Le CSE avait la possibilité, à majorité des représentants appelés à siéger à la réunion, de s’opposer à la visioconférence si l’employeur y a déjà au recours au moins trois fois et au plus tard 24 heures avant le début de la réunion, pour l’information et la consultation sur certains thèmes (procédure de licenciements collectifs, mises en œuvre d’un accord de performance collective, d’un accord de rupture convention- nelle collective ou du dispositif spécifique d’activité partielle). La signature des accords collectifs peut se faire par un dispositif de signature électronique. Du 3 mai 2020 au 23 août 2020, les délais de consultation du CSE ont été raccourcis pour les décisions de l’employeur ayant « pour objectif de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de Covid1 ». Les règles régissant la tenue de campagnes digitalisées mais aussi la communica- tion syndicale en général ne sont pas modifiées dans la période. L’accès des repré- sentants du personnel à l’intranet de l’entreprise reste encadré par l’article L. 2142-6 du code du travail qui dispose que les diffusions d’informations syndicales peuvent être prévues par accord d’entreprise. À défaut d’accord, les organisations syndicales constituées dans l’entreprise depuis au moins deux ans peuvent mettre à disposition des salariés des publications et des tracts sur un site syndical accessible à partir de l’intranet de l’entreprise. Les communications syndicales sur la messagerie électro- nique restent cependant soumises à l’autorisation de l’employeur en l’absence d’un accord d’entreprise précisant le contraire. |
Différents sondages (voir annexe 5) réalisés pendant la crise ont mis en avant un fort niveau de sollicitation des élus qui a pu néanmoins varier selon la nature des entreprises (selon notamment l’impact de la crise sur la continuité de leur activité) et selon les phases de la crise2. Pour les répondants à l’enquête de l’Anact3 (qui sont des représentants de l’employeur pour 15 % et des représentants du personnel pour 81 %, dans le secteur public et le secteur privé), les réunions entre représentants du personnel et la direction se sont poursuivies à un rythme plus soutenu qu’avant la crise pour 44 %, au même rythme qu’avant pour 36 % et à un rythme moins soutenu pour 18 %. Les élus tout comme les représentants des directions ont eu globalement le sentiment que leur charge de travail a augmenté pendant cette période. Pour faire face à cette sollicitation, une majorité des répondants indique que des moyens techniques ont été mis à disposition par l’entreprise mais ils indiquent aussi très majoritairement qu’il n’y a pas eu de ressources complémentaires attribuées pour maintenir le lien avec le personnel ou d’assouplissement des heures de délégation.
1 Le 19 mai 2021, alors qu’elles n’étaient plus applicables, le Conseil d’État a annulé ces dispositions, considérant que le gouvernement n’était pas habilité à modifier les délais d’information et de consultation du CSE
2 Les différents sondages ou enquêtes qualitatives mentionnées ici sont évidemment à prendre avec précaution, leur méthodologie ne garantissant pas la plupart du temps une représentativité statistique
3 Anact (2021), Impact de la crise sanitaire sur le dialogue social et les relations sociales, mai
Cette sollicitation s’est faite ou bien dans le cadre des instances officielles, ou bien dans des réunions informelles ou des structures ad hoc créées pour gérer la crise et pour gagner en souplesse. Elle s’est souvent produite dans des entreprises où le CSE avait peu d’antériorité et où une partie des élus étaient nouveaux et démarraient un premier mandat, ce qui a pu imposer un apprentissage accéléré de leur rôle et des difficultés de transmission entre anciens et nouveaux élus. Pour certains élus non préparés à l’ampleur de leur mission (et qui parfois ont fait leur première réunion en visio ou par téléphone), cela a pu provoquer un découragement voire un désengagement (également pour les suppléants peu ou pas associés)1.
En raison de la crise sanitaire, les sujets de santé et sécurité au travail ont trouvé au sein du CSE – ou dans les CSSCT quand elles existent – une importance nouvelle. Selon l’enquête de l’Anact, la réévaluation des risques professionnels et la mise à jour du DUERP ont été traitées pour près de la moitié des répondants. Plus largement, toujours selon cette enquête, les sujets traités portaient d’abord sur le plan de continuité d’activité et son suivi, les ajustements de l’organisation du travail à la crise, les modalités de télétravail, les situations des personnes vulnérables et les rémunérations.
1 Interrogés en janvier 2021 pour l’enquête Syndex (voir annexe 6), les représentants du personnel se disent alors fatigué pour 62 % (total des citations), inquiet pour 53 % et déterminé pour 43 %
Si les élus ont été fortement sollicités, la question de la nature de cette sollicitation peut être posée. Concrètement, là aussi, les pratiques sont hétérogènes. Dans l’enquête qualitative de Syndex, qui évoque un sentiment de faire « front commun », il ressort des entretiens qu’il a pu s’agir plus souvent d’informations données aux élus que d’une véritable association des instances, à travers notamment des consultations qui ont eu lieu a posteriori (comme autorisé par les dispositions d’urgence). Dans les entreprises de taille moyenne, il y a pu y avoir a contrario une augmentation des décisions unilatérales de la part des directions (notamment sur la mise en place du télétravail ou de l’activité partielle). Dans le rapport UPEC, certaines directions de très grandes entreprises considèrent que la période a permis de faire l’expérience d’un dialogue « partenarial », relativement « inédit », avec des échanges moins conflictuels et des acteurs qui ont « joué le jeu », ont partagé les analyses et solutions. Un point de vue partagé par certains représentants du personnel. Mais dans les grandes entreprises, le contexte a pu inciter à un renforcement de la centralisation du dialogue social, comme le soulignent les auteurs du rapport CMH dans le cadre des post-enquêtes Reponse 20171. Le rapport du CSO – dans le même cadre des post-enquêtes Reponse 2017 – constate lui, dans les entreprises étudiées, que si l’on observe un maintien de relations institutionnalisées là où elles existaient déjà avant la crise, on remarque plutôt un délaissement des instances représentatives du personnel là où elles étaient déjà précaires avant la crise.
Cette plus forte sollicitation s’est accompagnée de nouveaux modes de communication, en raison notamment des périodes d’interruption d’activité ou de télétravail pour certaines entreprises, avec un mixte de réunions en visioconférence, audioconférence ou présentiel. Les bilans tirés de l’usage de ces nouveaux outils sont contrastés. Ces outils ont présenté de nombreux avantages pour permettre des échanges rapides dans les situations d’urgence : moins de contraintes d’agenda notamment pour les entreprises multi-sites, possibilité d’adapter la durée des réunions plus facilement, diminution des coûts pour les directions, plus de participants disponibles, des discussions perçues comme plus pragmatiques, plus directes, plus rapides et permettant des échanges plus faciles entre élus et direction. Mais des difficultés sont également soulignées par les élus : des difficultés pour préparer entre eux ou échanger pendant les réunions, une moindre possibilité d’interpellation des directions, des discussions en bilatéral plus difficiles, des perceptions qui peuvent être brouillées par l’absence de langage corporel et pour certains un sentiment d’isolement qui peut aboutir à une démotivation.
Si cet usage de nouveaux outils a permis de maintenir des échanges dans les différentes phases de crise entre élus et direction, ils ont eu moins d’effets pour compenser les difficultés à communiquer entre élus et salariés. Selon les acteurs ayant répondu à l’Anact (p. 32), les temps d’échange et de coordination ont diminué entre élus et personnel pour 33 %, sont restés stables pour 32 % et ont augmenté pour 28 %. L’enquête de Syndex note que la moindre présence sur le terrain, sur les lieux de travail ou dans les permanences des élus n’a pu être compensée, selon les élus, par un usage plus important de moyens de communication, la possibilité d’utiliser les mails des salariés restant notamment très limitée par les directions. Pendant la crise, la communication vers les salariés a plutôt émané des directions ou de l’encadrement.
1 Les auteurs de deux monographies dans de grandes entreprises du secteur des technologies de l’information et de la communication notent pendant cette période une « captation du dialogue social au sommet de l’entreprise ». Voir Dupuy C. et Simha J. (2021), « Le dialogue social en entreprise en temps de pandémie », CNAM-CEE, novembre
Au final, selon l’enquête de l’Anact, 56 % des répondants considèrent que les relations sociales au sein de leur structure sont restées stables, identiques à ce qu’elles étaient avant, 36 % qu’elles se sont dégradées et 9 % qu’elles se sont améliorées. Selon l’enquête Syndex, pour l’avenir, 56 % des représentants du personnel estiment que la crise ne va rien changer au dialogue social dans l’entreprise. Les salariés interrogés sont moins nombreux à le penser (45 %).
Néanmoins, il est trop tôt pour dire si la crise a changé la nature et les pratiques du dialogue social (et notamment dans quelle mesure l’usage des nouveaux outils sera pérennisé1).
Globalement, les salariés semblent avoir une perception plutôt positive sur le fonctionnement du dialogue social pendant la crise, qui pourrait avoir un effet plus largement sur leur perception des nouvelles instances. Selon l’enquête Syndex, 60 % des salariés interrogés sont satisfaits de l’accompagnement par le CSE pendant la crise, 27 % ne le sont pas et 13 % ne « savent pas ».
Plus largement, le baromètre Cevipof2 auprès des salariés rend compte d’une perception positive du dialogue social en progression, même si les avis négatifs restent majoritaires. En 2021, 31 % des répondants (contre 19 % en 2018) considèrent que le dialogue social en général fonctionne bien et 69 % (81 % en 2018) qu’il ne fonctionne pas bien. Quand on pose la question de la perception du dialogue social « dans votre entreprise », 51 % répondent qu’il existe mais n’est pas efficace (49 % en 2018), 27 % qu’il existe et est efficace (21 % en 2018) et 22 % qu’il n’existe pas (30 % en 2018). Néanmoins, pour 60 % (61 % en 2018) le dialogue social reste « une chose trop compliquée » et pour beaucoup il existe encore une forte méconnaissance des nouvelles instances (voir les monographies Lyon-2 sur PME). Dans les petites entreprises, le CSE – et ses missions – est peu identifié par les salariés et quand il l’est, c’est d’abord pour ses missions « œuvres sociales et culturelles », plus que pour les autres et notamment ses missions relatives à la santé et à la sécurité au travail.
3.5. Le besoin de formation
Les difficultés rencontrées pendant la crise ont pu renforcer des besoins d’accompagnement des différents acteurs, qui s’exprimaient déjà auparavant. Le premier besoin est que du temps soit laissé aux acteurs de terrain pour réussir à faire fonctionner ces nouvelles instances et trouver les correctifs nécessaires (y compris par la voie d’expérimentation). Il s’agit ensuite d’un besoin de formation pour les représentants du personnel qui doivent prendre en charge de nouvelles missions mais également pour les encadrants ou responsables RH qui doivent organiser et accompagner ces évolutions.
1 Observatoire du dialogue social (2021), « E-dialogue social. Phénomène conjoncturel ou nouvelles pratiques durables ? », Fondation Jean-Jaurès, octobre
2 Voir Cevipof/Sciences Po, Baromètre du dialogue social
Un point de convergence de l’ensemble des travaux monographiques et des remontées qualitatives concerne l’inquiétude sur la capacité des élus à assurer leur mandat au regard de la somme de savoirs et de compétences que l’on attend d’eux. Le renouvellement significatif des profils des élus, peut-être moins souvent inscrits dans un parcours syndical militant, accroît cette difficulté, qui s’exprime par un sentiment de formation insuffisante.
Dans les entreprises où le CSE amène effectivement une modification du fonctionnement des instances, il rend les missions de ses membres plus exigeantes. Or si quelques dispositions (voir ci-dessous) sont prévues sur ce sujet dans les ordonnances, le renforcement de l’accompagnement en termes de formation est encore à construire.
Ce besoin d’accompagnement a pu être renforcé par la crise du Covid et la sollicitation renforcée qui l’a accompagnée. Dans l’enquête de l’Anact, à la question « quels sont, selon vous, vos besoins pour améliorer le dialogue social au sein votre structure ? » les trois réponses qui arrivent en tête sont : « écoute, dialogue, échanges et communication » pour 15 %, « reconnaissance, prise en compte des acteurs du dialogue social » pour 12 % et « des formations » pour 11 %.
Encadré 6 – Les moyens de formation des représentants à la lumière des ordonnances de 2017Aux droits à formation existants et notamment révisés par la loi Travail de 2016 – « congé de formation économique, sociale et syndicale » (CFE2S1), « droit à la formation en santé, sécurité et conditions de travail des élus » et « formation économique des membres du CSE des entreprises de 50 salariés et plus » notamment lorsqu’ils prennent un mandat (financée par le CSE) – s’ajoutent désormais deux aménagements issus des ordonnances : – le maintien automatique par l’employeur du salaire lors du congé de formation économique, sociale et syndicale, là où auparavant ce maintien n’était pas systématique, le syndicat devant en faire la demande (pour un maintien total ou seulement partiel) et remboursant l’employeur par la suite. Cela ne concerne pas le coût de la formation en elle-même, les salariés exerçant des fonctions syndicales pouvant bénéficier d’une prise en charge totale ou partielle de leurs frais de formation par des subventions d’État versées aux organismes de formation. – l’extension du droit à la formation en santé, sécurité et conditions de travail à l’ensemble des élus au CSE, au lieu d’être réservé à ceux qui comme dans le système précédent exerçaient des fonctions au CHSCT (et délégué du personnel en l’absence de CHSCT). Ces jours de formation demeurent cependant déduits des droits à congé de formation économique, sociale et syndicale. Depuis 2016, les acteurs de la négociation collective (les salariés et les employeurs ou leurs représentants) peuvent aussi recourir aux « formations communes au dialogue social » (art. L. 2212-1 du code du travail). Ces formations peuvent être intégrées au plan de développement des compétences de l’entreprise afin d’en faire bénéficier salariés et employeurs. Pour les salariés, elle peut s’inscrire dans le cadre du congé de formation économique, sociale et syndicale, mais uniquement auprès des centres de formation listés dans l’arrêté du 2 janvier 2019. (Pour les employeurs, elles peuvent être financées par les fonds d’assurance formation de non-salariés ou par les Opco dans les cas prévus par le décret n° 2017-714 du 2 mai 2017). |
1 Devenu à l’issue de la loi climat et résilience de 2021, le congé de formation économique, sociale et environnementale et de formation syndicale, sans modification de moyens associé
Les capacités de dialogue et de négociation des représentants du personnel et des directions de ressources humaines sont ainsi mises sous tension. Les besoins de compétences et de formation au dialogue social prennent une nouvelle ampleur, entre connaissance et savoir-faire. Les compétences attendues de ces acteurs sont en effet nombreuses et diverses. Des savoirs « techniques » tout d’abord, et ce dans de multiples registres : juridiques pour maîtriser le nouveau cadre légal de représentation et de négociation ; économiques et financiers pour gérer les questions et débats stratégiques, mais aussi sanitaires, sociaux ou organisationnels s’agissant de traiter les questions SSCT.
Ensuite, ces compétences sont pratiques et relationnelles s’agissant d’animer des réunions ou une négociation, convaincre, communiquer ; « comportementales » s’agissant de la capacité d’écoute, d’empathie, de décryptage et de prise de recul avec ses interlocuteurs.
Tendance lourde, la formation est d’abord technique à caractère juridique du fait de la succession de réformes cumulant des normes et obligations qui nécessitent du temps pour être ingérées... et digérées. Ce qui répond à une demande des salariés et des responsables RH, en raison de l’évolution constante et rapide des règles, mais ce qui peut aussi amplifier le caractère « procédurier » des relations de travail. On s’intéresse d’abord aux procédures, aux règles juridiques de la négociation, ainsi qu’aux objets du dialogue, aux thèmes de négociation et pas vraiment à la méthode du dialogue (comment s’écouter ? comment dialoguer ?).
L’approche juridique du dialogue social est nécessaire mais réductrice. Quelle part reste- t-il pour des formations générales permettant aux acteurs du dialogue social de comprendre les évolutions technologiques, économiques, sociétales et environne- mentales, dans un contexte où ces différentes dimensions doivent être appréhendées conjointement ?
Quelle place effective par ailleurs pour « le savoir être », ce qui rejoint la formation d’animation de projet, de gestion de personnalité et du dialogue social, qui concerne les personnes expertes du dialogue social mais également tous les cadres de l’entreprise ?
L’ampleur de l’accès à la formation des élus du personnel est mal connue. Il est difficile de savoir à quel point les dispositifs déployés par les organisations syndicales couvrent une part importante des élus et représentants syndicaux, au regard des besoins. On ne dispose d’aucun outil de suivi des efforts de formation des élus et syndiqués, que ce soit par les entreprises, les syndicats ou l’administration du travail. Les organisations syndicales font mention de difficultés permanentes à former et de la tentation des entreprises de former par elles-mêmes les élus en choisissant l’offre et en conditionnant le financement. Une offre de formation sur le dialogue social tend également à se développer hors organisation syndicale, à laquelle les représentants du personnel des CSE des PME qui ne sont pas syndiqués et les directions d’entreprise sans syndicats sont plus directement confrontés.
Pour les élus des PME, le recours à la formation est encore plus difficile à identifier, mais vraisemblablement il s’agit d’une tendance faible. L’accès à la formation pour eux est particulièrement difficile, notamment pour une question de temps disponible et de conciliation entre activités liées au mandat et activités professionnelles. Globalement, le manque de formation renvoie aussi souvent à un sentiment partagé d’inutilité et d’incompréhension des enjeux du dialogue s ocial. Recueillir les points de vue de leurs collègues, les analyser et les synthétiser en une position ou une revendication à porter devant la direction sont des exercices qui ne leur sont également pas familiers.
Du côté des employeurs, la question des compétences et de la formation au dialogue social se pose tout autant mais en des termes différents.
L’idée même de formation des dirigeants au dialogue social n’est pas évidente, quand ce n’est pas un impensé1. Il n’existe pas vraiment de cadre légal visant à la formation des employeurs, les dispositions existantes ne visant que les salariés. Par exemple, les formations que la CPME propose pour ses adhérents sont des formations spécifiques portant uniquement sur les prud’hommes, le secourisme ou des formations RH très généralistes.
1 On peut noter par exemple que dans la ventilation des fonds de l’AGFPN, il n’existe aucun montant fléché pour les organisations patronales au titre de la mission 3 relative à la formation au dialogue social
Le savoir-faire en matière de dialogue social est en partie renvoyé soit à une faculté « naturelle » du dirigeant, à son expérience ou éventuellement à une connaissance acquise par le biais du milieu patronal (réseau personnel, clubs et associations d’employeurs, éventuellement fédérations professionnelles). Dans les TPE-PME, la connaissance juridique en matière de dialogue social va être le fait de l’expert-comptable ou juridique, éventuellement d’un interlocuteur de la branche. Dans les grandes et moyennes entreprises, l’idée est plutôt qu’il s’agit d’une compétence que l’entreprise acquiert par le marché : les salariés sont recrutés pour des postes qui impliquent d’avoir une compétence ex ante en dialogue social et négociation collective. Lorsque l’on recrute un directeur des relations sociales ou humaines alors qu’il existe des délégués syndicaux ou CSE, ces cadres sont recrutés pour leurs compétences en la matière, soit acquises par leur formation initiale (étude juridique de droit social ou ressources humaines), soit durant leur expérience professionnelle.
En revanche, s’agissant des compétences requises, elles sont en partie les mêmes, notamment la connaissance de la législation sur la négociation collective et le CSE. Avec les évolutions législatives très régulières qui bouleversent le paysage juridique, il faut assurer une formation continue qui passe par des organismes de formation professionnelle classiques, par des consultants ou par les fédérations patronales ou autres associations de dirigeants. Un enjeu important pour ces acteurs tient à la rédaction de leurs accords collectifs et à leur qualité juridique pour écarter des risques de contentieux.
Au sein de cette offre globale de formation figurent aussi désormais des « formations communes ». Elles ont été promues par le rapport Combrexelle (2015) qui soulignait la nécessité « d’élaborer une pédagogie de la négociation collective démontrant le caractère nécessaire de celle-ci dans un contexte concurrentiel ». À l’instar de ce qui se fait au Québec, il s’agit d’une pédagogie de la négociation commune aux entreprises et aux syndicats, où la négociation est enseignée comme une technique et une méthode, chacun restant ensuite bien évidemment libre de ses options syndicales. Les négociateurs, tant du côté des syndicats que des employeurs, doivent disposer de connaissances techniques, mais la formation des acteurs doit également porter sur les aspects sociaux et économiques ainsi que sur la pratique de la négociation. L’objectif est notamment d’arriver à dépasser l’image d’un dialogue social conflictuel, peu collaboratif, qui colle à la France notamment au travers de différentes enquêtes internationales1.
1 Telles que celles du World Economic Forum, ou dans une certaine mesure celle d’Eurofound qui soulignent le déficit de coopération
De ce projet, un dispositif de formation commune a progressivement été structuré depuis 2016 avec les partenaires sociaux autour d’un cahier des charges et un système de référencement élaboré sous l’égide de l’INTEFP.
Le déploiement de ces formations communes semble encore limité. Si l’offre se structure et se développe par le référencement, elle a du mal à trouver sa demande. Le rapport 2020 de Format Dialogue au sein de l’INTEFP ne rend compte d’aucun chiffrage sur le nombre de bénéficiaires. Certes les années 2016-2019 ont été des années de mise en place, d’expérimentation de la méthode, et l’année 2020 avec la crise du Covid n’a pas favorisé leur déploiement. Une réflexion sur la concrétisation des principes notamment sur la base de retours d’expérience semble cependant nécessaire, en particulier pour comprendre pourquoi on se heurte à cette limite dans la mise en œuvre de ces formations communes.
Publié le 22 février 2022
Sources : Évaluation des ordonnances du 22 septembre 2017 – Rapport 2021 - FRANCE STRATÉGIE
Institution autonome placée auprès du Premier ministre, France Stratégie contribue à l’action publique par ses analyses et ses propositions. Elle anime le débat public et éclaire les choix collectifs sur les enjeux sociaux, économiques et environnementaux. Elle produit également des évaluations de politiques publiques à la demande du gouvernement. Les résultats de ses travaux s’adressent aux pouvoirs publics, à la société civile et aux citoyens.
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